L’Hydrologie Régénérative « Et si on pouvait cultiver l’eau »
Au cours du 1er semestre 2025, la chargée de mission PSE (Paiements pour Services Environnementaux) du Pays de la Déodatie a assisté à une conférence de Samuel BONVOISIN, conférencier, consultant et formateur en conception de systèmes régénératifs. Cet événement, organisé à la Vigotte Lab à Girmont-Val-d’Ajol, portait sur le thème de l’hydrologie régénérative : la science de la régénération des cycles de l’eau douce par l’aménagement du territoire (définition proposée lors des Rencontres de l’Hydrologie Régénérative à Annecy). |
On y apprend tout d’abord que les pluies continentales présentes sur notre territoire sont issues en majorité du cycle de l’eau verte provenant de l’évapotranspiration des plantes et du sols. Ainsi, la présence ou non de végétation (culture, forêts, prairies, artificialisation des sols) sur un territoire a un rôle important à jouer dans le cycle de l’eau.
Dans les années 60, on a vu une simplification des paysages avec une suppression d’obstacles, comme les haies, les mares, ainsi qu’une artificialisation des sols, empêchant ainsi le ralentissement de l’eau et sa bonne infiltration dans le sol. |
L’hydrologie régénérative a pour but de travailler sur les paysages et avec la nature pour développer des techniques permettant de : RALENTIR, INFILTRER, STOCKER, ÉVAPOTRANSPIRER l’eau sur le territoire. |
L’une des techniques phares de l’hydrologie régénérative est le « Keyline Design ».
Cette technique consiste à creuser des baissières en suivant certaines courbes de niveau du champ, pour que l’eau soit stockée dans ces baissières et ait le temps de s’infiltrer dans le sol. Il est intéressant de mettre une haie pour éviter qu’elle ne s’évapore trop vite, notamment en été lors de période chaude.
Si le sujet vous intéresse ? Retrouvez plus d’informations sur le site de l’association « Pour une hydrologie régénérative » https://hydrologie-regenerative.fr/accueil
Exemple de mise en pratique de l’Hydrologie Régénérative : Visite d’un site d’abissage en Belgique
Un groupe de travail s’est créé dans la vallée de la Bruche afin de travailler sur l’arrosage des prairies permanentes, pratique utilisé auparavant sur de nombreux territoire du Massif des Vosges.
C’est a à cette occasion que des agents du PETR se sont rendus en Belgique, dans les Ardennes, où un site d’arrosage, appelé « abissage » là-bas, a été restauré grâce aux travaux de Pierre LUXEN, en 2013, 100 après la fin de son utilisation. Cette technique est reconnue au patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’UNESCO depuis 2023.
Le principe de l’abissage de prairie :

Plusieurs techniques sont possibles et sont souvent adaptées au relief de la prairie.
L’idée ici est de dévier une partie du cours d’eau principal, en abaissant cette porte métallique, dans un canal passant sur les hauteurs des prairies. L’arrosage des prairies se fait lorsque l’eau se trouve en abondance, ainsi pendant les périodes d’hiver début de printemps. Cela permet d’assurer un volume suffisant dans le cours d’eau principal.

L’eau déviée va petit à petit remplir le canal longeant le haut de la prairie. Plusieurs « portes » sont positionnées à intervalles réguliers sur le canal. Ces portes sont fermées lorsque l’on veut bloquer l’eau et la laisser déborder sur la prairie. L’eau va ensuite s’infiltre dans le sol et s’écouler dans la pente. L’eau qui ne se sera pas infiltrer dans le sol retournera dans le canal principal.


Les avantages de l’arrosage sont nombreux, et contrairement à ce que l’on peut penser, ce n’est pas d’arroser en été pour augmenter la production lors de la période sèche. En effet, l’arrosage se fait en période d’hiver et début printemps et permet de :
- Réchauffer le sol au printemps. A cette période de l’année, la température du sol est inferieur à celle de l’eau. La végétation peut ainsi redémarrer sa croissance plus rapidement
- Apporter des éléments fertilisants, des nutriments et de l’oxygène par l’eau des rivières
- Humidifier les sols secs pentus pour assurer une production normale ou humidifier les sols lors des bises de printemps
- Laver ou nettoyer les prés au printemps en nivelant les taupinières et autres résidus, les prairies sont alors plus faciles à faucher.
Éléments de contexte :
La visite du site s’est faite dans les Ardennes à 800m d’altitude. L’arrosage du site date de 1864 et s’est interrompu lors de la première guerre mondiale. Il a été repris 100 ans après, grâce aux travaux de recherche de Felix X.
Le site est composé de 2 canaux d’arrosage, un sur chaque coté de la prairie et du ruisseaux naturel au centre.
Au Moyen-Age, la région était pauvre et chaque foyer possédait quelques animaux sur sa ferme. La production de fourrages était donc un enjeu important pour la région et c’est ainsi que les techniques d’arrosage de prairie (ou « abissage » terme utilisé en Belgique) sont apparues et ont été utilisées dans les fonds de vallées.
Ces techniques se sont peu a peu perdues jusqu’en 2013, quand Felix X a décidé d’étudier l’abissage et de remettre en état un site.
Pour plus d’information, n’hésitez pas à consulter l’article « Les prairies d’abissage en Ardenne belge : un patrimoine naturel remarquable à sauvegarder » Luxen, P., Philippe, A., & Rouxhet, S. (September 2010). Les prairies d’abissage en Ardenne belge : un patrimoine naturel remarquable à sauvegarder. Fourrages, 203, 231-234
Actualités – Adaptation au changement climatique :